PORTUGAL : SORTIE DE L'EURO

  

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Euro : Pourquoi prolonger la souffrance ?

Sombrez dans son regard...Puisque les plus éminents spécialistes financiers crédibles s'accordent à dire que le maintien de l'Euro en l'état est impossible, pourquoi alors entraîner le Portugal, la Grèce, l'Irlande, et bientôt l'Italie, l'Espagne et peut-être la France, vers un futur sans avenir ?

En d'autres termes, pourquoi certains élites et autres technocrates s'acharnent-ils à maintenir artificiellement et à tout prix l'euro en vie, faisant par la même occasion souffrir davantage les populations, tout en augmentant en parallèle l'ampleur du désastre ?

Certains y ont intérêt par pure stratégie politique, voulant ralentir le processus et reporter le moment inévitable jusqu'à une date leur convenant au niveau de leur carrière. Ils prolongent ainsi le sacrifice de centaines de millions d'européens et aggravent les économies, par pure convenance personnelle, faisant ainsi preuve d'une totale irresponsabilité condamnable.

D'autres encore savent que l'Euro est la seule pierre de l'édifice europe qui peut encore être considérée comme commune. Et c'est beaucoup dire, puisque certains pays ne veulent surtout pas l'adopter. Ces élites savent au fond que quand l'Euro s'écroulera, il est fort probable que cette europe se désintègre. Au nom des financiers ils font donc tout leur possible pour retarder la bombe, quitte à ce que les dégâts soient bien plus importants par la suite.

Mais le maintien en vie artificielle de l'Euro a également lieu parce que certains pays comme l'Allemagne veulent à tout prix préserver les intérêts de leurs banques. Ils savent qu'en cas de défaut d'un des pays, leurs banques qui avaient prêté à des taux parfois vertigineux, ne pourront qu'en pâtir. D'où leur acharnement à maintenir l'euro en survie le plus longtemps possible.

C'est aussi une des raisons pour lesquelles la troika (FMI + Commission européenne + BCE) ont récemment (en contrepartie d'immenses sacrifices imposés aux populations et aux économies),"prêté" d'importantes sommes aux pays dits en difficulté, non pas afin de les "aider" ou de les "sauver", mais uniquement afin qu'ils puissent rembourser les banques européennes. Ils savent au fond pertinemment que la situation ne pourra pas s'éterniser, sans compter le fort risque d'explosion sociale. Mais ils considèrent que tant que ça dure, et que les populations accepteront de souffrir sans broncher, ce sera toujours ça de pris.

  

Le Portugal peut-il se sauver du désastre européen ?

Sombrez dans son regard...Le Portugal ne s'en sortira pas véritablement en quittant uniquement l'Euro, tant que cette europe demeurera en place avec ses règles rigides servant les intérêts de la finance en imposant des mesures drastiques et uniformes à des pays ayant des intérêts opposés.

Car la liberté de pouvoir reprendre le contrôle de sa monnaie afin de réduire le poids de la dette sera certes un ballon d'oxygène et lui redonnera peu à peu la marge de manœuvre qu'il possédait avant d'intégrer l'UE. Cependant, après ce séjour dévastateur au sein de l'UE, le pays s'est beaucoup appauvri en ayant fortement été endetté par les marchés financiers.

Rien qu'entre 2000 et 2010 le Portugal a ainsi perdu plus de 100 Milliards d'Euros uniquement destinés à payer les intérêts de la "dette". (1). La dette externe portugaise a comme dans la plupart des pays de l'UE atteint un niveau abismal. (Dette publique + privée estimée à 230% de son PIB). En effet, et contrairement à des pays très endettés en interne comme le Japon, les règles des traités européens ont entraîné une immense dispersion des créances et des créanciers, faisant perdre le contrôle de la dette aux pays concernés. Le Portugal devra passer par une re-négociation et un étalement de sa dette, qu'il amoindrira par ailleurs par des ajustements de sa monnaie.

(1) Ce qui explique que le "prêt" de 87 Milliards d'Euros, dont 12 alloués aux banques, ne suffira pas, contrairement à l'évaluation qui avait pourtant été faite par l'europe et le FMI.

  

Souffrance terminée ?

Maintenant qu'ils ont été trompés par les sirènes de la technocratie européenne, les portugais vont de toute façon devoir subir les inconvénients de leur entrée dans l'euro, suivis de la sortie de celui-ci.

Sortir d'un aussi gigantesque piège et de ses conséquences ne sera certes pas une partie très facile. Cependant pas aussi difficile que beaucoup veulent le faire croire à tout prix.

Mais au moins ils pourront reprendre leur destin en main. Et ce sera cent fois préférable que de se maintenir enfermés dans le piège et ainsi continuer à subir l'accroissement des effets désastreux que le Portugal a enduré depuis son entrée dans cette europe, puis dans cet euro, et qui amplifient de jour en jour au bon vouloir des marchés et des agences de notation.

  

La solution miracle ?

Sombrez dans son regard...Dès la sortie de l'euro il y aura beaucoup à faire. Car en parallèle à un appauvrissement purement financier, l'économie portugaise a été en partie détruite par la désinsdustrialisation et le chômage entraînés par l'adoption de l'euro. Le Portugal a ainsi perdu jusqu'en 2011 environ 50% de son tissu industriel depuis son entrée dans l'Euro. Et le taux de chômage ne cesse d'augmenter atteignant des niveaux record.

Les effets de la monnaie unique se sont donc avérés catastrophiques et comme ailleurs, ils ont entraîné chômage, précarité pauvreté et violence. La dégradation subie se ressent sur tous les pans de la société portugaise.

Comme les autres pays du Sud faisant partie de l'Euro, le Portugal a donc subi les inconvénients de l'euro de plein fouet au bénéfice exclusif de pays comme l'Allemagne qui a créé l'euro à sa mesure, et qui a pu conforter son industrie et son secteur bancaire à de hauts niveaux, le tout en exportant une importante partie de sa productions vers les pays du Sud.

Pour s'en sortir, puis tendre à ré-industrialiser le pays, et créer des emplois qui ne se cantonnent pas aux services, le Portugal devrait mener une politique exactement contraire à celle qui lui a été imposée par cette europe. Il devrait établir un "protectionnisme sélectif des produits" aux frontières de façon à pouvoir ré-équilibrer sa balance commerciale de façon durable, tout en créant des emplois, de la plus-value, et donc de la richesse pour relancer son économie.

A titre d'exemple, il devrait imposer des quotas stricts et contrôlés faisant en sorte que les portugais n'achètent à l'Allemagne que les voitures allemandes fabriquées au Portugal !

De même pour un certain nombre d'autres produits industriels qui tendent à défavoriser la balance commerciale portugaise. Le Portugal pourrait ainsi récupérer une partie de l'industrie écroulée par les inconvénients de l'euro et entrer dans une spirale durable ayant des effets positifs évidents sur l'emploi. Mais pour pouvoir établir de telles règles salvatrices, il faudrait enfreindre les règles imposées par cette europe. Ce qui sera probablement impossible tant qu'elle demeurera en vie.

Maints autres aspects seront à aborder de façon novatrice et efficace. Investir dans l'avenir, favoriser la recherche et la création d'entreprises; favoriser les investissements destinés à moderniser l'appareil de production, ne sont que des exemples auxquels ils faudra accorder une réelle importance. Mais pour cela il ne faudra pas croire aux miracles mais compter sur des idées novatrices et originales, autres que les pensées restreintes et bornées émises depuis des décennies par les successifs politiciens de carrière.

  

Et le social ?

A l'image de certains pays du Nord qui n'ont pas adopté l'Euro, et qui ont donc affronté la crise en ayant les mains plus libres, en s'en sortant très bien tels le Danemark ou la Suède, le Portugal devrait profiter de la sortie de l'euro pour restructurer divers pans entiers de son économie, en engageant certes des réformes, mais en tenant compte du bien-être et des intérêts de ses citoyens; c'est à dire exactement l'inverse des préconisations de cette europe qui prône le sacrifice des salariés et le confort des citoyens en général, et s'empresse également de tout faire pour livrer les services publics majeurs au privé.

A titre d'exemple, il peut être bénéfique de revoir les lois régissant la rigidité des contrats de travail. Mais ceci ne rencontrera une adhésion et une véritable acceptation qu'en développant une logique sociale et que si en parallèle l'Etat prend réellement en charge les chômeurs, de façon aisée, simple et digne, au lieu de s'acharner à réduire l'ensemble des prestations et de les entraîner dans une impasse nuisible à tous points de vue. Toutes les parties sortiront gagnantes d'un "deal conçu de façon moderne", adapté à la réalité économique, mais qui préserve réellement les intérêts et le moral de ses citoyens.

A l'image de l'exemple Suédois, le Portugal devrait une fois pour toutes en profiter pour considérer que le pays tout entier a communément intérêt à ce que le moral et la confiance règnent; à ce que les citoyens s'aperçoivent qu'ils sont pris en compte, choyés et respectés. Un citoyen respecté et considéré est immensément plus fier de son pays, plus heureux de vivre et de travailler. Il est aussi plus productif, plus efficace, donc plus rentable. Ce dernier aspect devrait être pris en compte par "les camps" qui se considèrent comme opposés et ne voient pas que les intérêts des uns et des autres convergent, s'ils sont abordés avec logique et cohérence.

  

Portugal bonheur ?

Sombrez dans son regard...Probablement que personne n'envisage une plongée radicale autrement qu'utopique dans un bonheur supposé.

Mais si toutes les parties font en sorte de faire converger leurs intérêts avec intelligence et compréhension vers un même objectif, celui d'une harmonie commune et d'un Portugal prospère, alors le Portugal peut se transformer en un pays radieux et dynamique, dans lequel les habitants cohabiteront volontiers avec joie et entrain !

Séparer les banques suivant leurs objectifs et maintenir une banque nationalisée. Apprendre à attirer l'investissement étranger par des moyens originaux. Favoriser un libéralisme intelligent et plus juste avec des aspects sociaux traités enfin de façon efficace, (ex : la mise en place d'un excellent service gratuit de santé, permettant un bon état physique et moral des habitants), pendant que l'Etat n'interfère pas directement et de façon bureaucratique dans le processus économique, tout en veillant à se ériger en arbitre impartial soucieux de répondre à l'intérêt général, ce qui est son rôle naturel.

Accepter que les richesses s'épanouissent à leur aise, mais tout en tirant les classes moyennes vers le haut et non l'inverse... voilà un défi que le Portugal doit relever, pour se relever lui-même et croître de façon positive en tendant vers un succès dont chacun pourra profiter à son niveau et suivant son travail, ses envies et ses aspirations.

  

Europe, encore en vie ?

Cette europe est-elle encore en vie ? Lorsqu'on a vu les désaccords récents concernant schengen; lorsque le Danemark décide de fermer ses frontières; lorsque cette europe amalgame des pays adeptes et non adeptes de sa monnaie unique; lorsque chaque pays "achète l'euro" à des prix différents; lorsque la relation entre les diverses populations des pays commencent à générer des conflits; lorsque des pays oeuvrent pour leur propre intérêt au détriment des autres; lorsque chacun des pays a signé un traité de Lisbonne à sa sauce; lorsque la BCE passe outre les accords de Maastricht en se substituant aux banques ? 

Et surtout lorsque les populations commencent à prendre conscience des immenses dégâts et des affronts à la démocratie qu'elles subissent avec cette europe... Peut-être que cette europe est au fond déjà morte, sans même que nous ne nous en soyons aperçus.

  

Fédéralisme ?

A l'instar des dirigeants de l'ancienne Urss, et en pleine déconfiture européenne, les technocrates européens ont beau répéter mille fois "qu'il faut plus d'europe" et "que l'europe et l'euro les protègent", il s'avère que les européens s'aperçoivent de leur régression constante, et des terribles dégâts qu'ils ont subi avec cette europe et ses règles absurdes.

La plupart veulent une europe "light", qui respecte la démocratie et leurs libertés, qui ne les entraîne pas dans la précarité et le chômage; qui ne soit pas dominée par des milliers de lobbies; qui n'impose pas sa politique uniforme et aveugle; qui facilite les échanges économiques par des accords simples tout en rendant la circulation des citoyens aisée, mais sans devoir supporter la lourdeur et les aberrations d'un mostre bureaucratique aussi rigide que les dizaines de milliers de pages de directives qu'il impose aux Etats.

Désormais les européens s'aperçoivent que le fédéralisme a ses limites et est voué à l'échec. La Belgique, un petit pays par la superficie, possède trois "pôles" pourtant unis géographiquement mais incapables de s'entendre.

Ils voient également l'exemple des USA, entité "fédérée idéalement", avec des pays regroupés géographiquement, ayant la même culture, la même histoire, les mêmes objectifs, la même façon de penser et la même langue. Finalement le fédéralisme à grande échelle est une utopie, puisque désormais la vingtaine d'Etats américains en faillite vont devoir "se débrouiller" par eux-mêmes face aux difficultés des USA, marquant ainsi les limites d'une idée globale fédératrice et mutualisée.

Imaginons ce que donnerait une europe ultra-fédérée avec des pays éloignés et différents, des cultures hétérogènes, des histoires et des passés non communs, des intérêts diamétralement opposés, des ressources différentes, et même des langues diversifiées.

Qu'ils s'unissent autour d'un regroupement "light" afin de se regrouper intelligemment face à la réalité économique d'un monde segmenté par des blocs est évidemment une nécessité; mais sûrement pas en un énorme regroupement rigide, et technocratique imposant ses contraintes, sa lourdeur et ses aberrations.

Dès sa sortie de l'euro ou dès l'éclatement de celui-ci, on ne peut que souhaiter bonne chance au nouveau Portugal qui ne manquera pas de renaître et de jaillir peu à peu des cendres d'un passé à vite oublier, et d'enfin se tourner vers un avenir prometteur.

 

Portugalmania - le 7 /08/2011

  

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Notes

S'il ne sort pas de l'euro, on estime que le Portugal atteindra 600 Mille chômeurs en 2011, et la banque du Portugal pointe vers une augmentation de 100 mille chômeurs supplémentaires en 2012.

En poursuivant dans la fausse route dictée par cette europe, le Portugal tomberait dans une récession grave alimentée par une politique d'austérité qui se prolongerait indéfiniment, tout en ne résolvant aucun des problèmes auxquels le pays a été forcé d'être confronté par les règles européennes.

Pire encore, les plans d'austérité poursuivis entraîneraient le pays dans une déflation qui ferait accroître plus encore sa dette. Il serait alors plongé dans une spirale infernale de laquelle il ne verrait pas la fin avant des décennies. D'autant plus que la destruction massive de son industrie subie par l'entrée dans la zone Euro, le prive désormais de toute marge de manœuvre, puisque l'emploi au Portugal est devenu hautement tributaire du tertiaire, autrement dit, indirectement tributaire en grande partie des économies des autres pays.