Fado

 

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le fado portugais

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Le fado...

 

Le fado... Contexte...

FADO portugaisAu XIXè siècle le Portugal boût comme une marmite s'apprêtant à exploser. Ce bouillonnement est généré par :

- Un contexte économique tumultueux.

- Un amoncellement de nouvelles cultures très différentes faisant du Portugal un vivier incroyablement hétérogène.

- Une large panoplie de couches sociales diversifiées et opposées.

- Le poids d'une religion dogmatique dominante, étouffant les initiatives et amenuisant le développement du rêve.

- Ainsi que par une multitude de consciences politiques tendant vers des idéaux radicalement opposés pour l'époque.

 

Le fado s'envole...

Ce bouillonnement de la société duquel sortent généralement les grandes révolutions, a quant à lui induit au Portugal des flots de créativité, donnant naissance à des courants et à des formes d'expression diverses et nouvelles, dont le fado.

Le fado a trouvé sa réelle expansion dans ce contexte de mouvance sociale, d'incertitude idéologique, et de tumulte de la pensée. Bizarrement, cette expression musicale aujourd'hui dénuée de tout artifice chorégraphique, a d'abord été assimilée et associée à des mélodies et des danses afro-brésiliennes. Alors que désormais, seule une ou deux guitares et la voix d'un(e) fadiste symbolisent le fado.

L'ivresse des contrastes forge à cette forme d'expression une personnalité et une véritable force. Le destin le conduit jusqu'à la bouche sulfureuse d'une certaine Maria Severa. Galbé par la voix implorante de cette jeune épicurienne, le fado prend son véritable envol.

 

Le fado... improvisé, puis restreint

Le fado revêt ensuite les habits les plus divers et les plus étonnants. Il trouve d'abord son âme véritable, enveloppé dans des guenilles déchirées de simple manant errant entre aventuriers, brigands, ivrognes et prostituées dans les recoins des tavernes ornant les quartiers populaires d'Alfama, Bairro Alto, Madragoa ou Mouraria.

Dans cette multitude de tavernes sombres, on invente une phrase qui restera dans l'histoire du fado : "Silencio, que se vai cantar o fado!" (Silence, car on va chanter le fado !). Bizarrement, les verres se vident, les ivrognes se taisent, et on écoute, car le fado est devenu une sorte de religion de ces sombres endroits mal famés et se doit d'être respecté ! N'est-il pas le seul exutoire du peuple ?

Monte alors la clameur d'un chant entamé  "à la volée", vagabond (vadio), improvisé et malmené mais sincère, criant et criard, faisant jaillir jusqu'aux cieux les rancoeurs et les souffrances des pauvres gens.

Le fado est vite amalgamé à une forme de liberté se métamorphosant ainsi en une sorte d'énergumène incontrôlable allant même jusqu'à parfois oser brandir les armes textuelles coupantes et incisives envers le pouvoir en place... au point que la dictature en vient à l'interdire ! Toute taverne ou lieu quelconque où cette forme d'expression fadiste s'exprime en n'ayant pas l'aval de l'Etat fasciste, et sans que les textes ne soient préalablement soumis à approbation des représentants de l'Etat totalitaire, se retrouve immédiatement avec d'énormes ennuis.

Le pouvoir fasciste d'alors vient ainsi d'étouffer le fado, en tuant l'improvisation qui donnait au fado sa véritable raison d'être, sa spontanéité, et son principal intérêt.

Le fado devient édulcoré par la force des choses. On le dorlote et on lui apporte des "touches folkloriques", telles le port d'un châle porté par les chanteuses féminines inventé par Amalia Rodrigues un jour où elle "n'a rien de beau à se mettre sur le dos". On dira par la suite qu'elle souhaitait ainsi rendre un hommage à Maria Severa. Alfredo Marceneiro, devenu un des plus grands fadistes masculins, lance quant à lui une mode consistant à entrer en scène vêtu d'un costume noir... Et ainsi naissent les mythes.

 

Le fado édulcoré et convoité

Le fado ayant trouvé sa "voix", ou plutôt sa voie, devient alors le sujet de toutes les convoitises. A tour de rôle, le fado est accaparé par des classes sociales opposées.

Le fado initial broyé dans son essence, prend du crédit et du galon, jusqu'à revêtir de somptueux costumes d'aristocrate, déambulant entre les boiseries dorées de somptueux palais où la bourgeoisie branchée se prend au jeu, l'écoutant le petit doigt levé, tout en savourant le dernier thé délicieux fraîchement arrivé de Ceylan. Isnt'it, Dear ?

Quels habits conviennent le mieux au fado ? Probablement ceux qui reflètent davantage le peuple, celui-là même qui ira plus tard véritablement s'imprégner de son essence.

Le fado demeure donc malgré tout un art populaire, ou du moins adopté par le peuple, trop content d'avoir encore un accès autorisé à la culture, fut-elle restreinte.

Le chant fadiste envahit Lisbonne, et chaque recoin de la capitale est bon pour ouvrir un café ou un cabaret de fado, devenu autant une mode locale qu'un attrait touristique presque dénaturé, que l'on décide de qualifier de "fado traditionnel", par opposition au fado improvisé.

Fini le fado lancé à la sauvette par un vagabond de passage ou un simple amateur d'un jour, désireux de crier ses sentiments du moment... et vive le fado contenu, structuré et dompté, chanté par des fadistes devenus professionnels.

 

Le fado acquiert de la visibilité

La conviction et le talent des pionniers du fado dont Ercilia Costa, Herminia Silva, Berta Cardoso et Alfredo Duarte dit "Marceneiro", ont véritablement installé le fado "traditionnel" comme une désormais inévitable forme d'expression musicale populaire.

Ercilia Costa commence à exporter le fado au-delà des frontières du Portugal; Alfredo Marceneiro incarne le fadiste masculin par excellence, et Herminia Silva compose, créé, et met le fado en lumière.

Mais c'est surtout une certaine Amalia Rodrigues qui va ensuite véritablement transporter le fado hors des frontières du pays, lui apportant la crédibilité et la notoriété nécessaires à sa véritable expansion. Pendant que l'Europe croule sous les bombes, Lisbonne est tranquille, découvrant l'insouciance d'Amalia, une jeune fille enjouée qui grâce à sa voix fabuleuse et à son incroyable conviction, va donner au fado sa véritable consécration.

Le fado vivra ensuite des jours heureux, chanté et porté avec enthousiasme par de multiples fadistes, de très nombreux artistes qui lui consacreront leur vie.

 

Le fado, rescapé par miracle...

Malheureusement, les chanteurs marquent le pas du temps, et le fado en pâtit. Le déclin d'Amalia elle-même, voit le fado s'éteindre peu à peu, allant jusqu'à quasiment mourir à l'abandon. Cette expression musicale parvint néanmoins à subsister, mais uniquement confortée par la forte conviction de véritables amateurs, ou encore supportée dans sa forme "vadia" (errante), ré-appropriée par la rue. Au fond, n'étais-ce pas là sa nature profonde ?

Le fado doit aussi sa survie à la providence découlant d'un intérêt entretenu par un maketing touristique. Cette aubaine a toutefois transformé le fado en une sorte d'attrait galvaudé, et en un pseudo-symbole du Portugal, que le fado n'a en fait jamais été.  Qu'importe, puisque le galvaudage a au moins le mérite de le maintenir en vie en attendant, en attendant...

 

Le fado renaît sous de multiples lumières

Comme s'il se devait de renaître de ses cendres, le fado revient alors vite à la vie, grâce il est vrai essentiellement à la clairvoyance de producteurs étrangers ayant cru en sa renaissance et ayant misé sur l'émergence de nouveaux talents qui, portant depuis longtemps le lourd poids de l'ombre d'Amalia, voulurent emporter le fado sur d'autres rivages, sur d'autres océans, et le teinter à leur image en le parfumant de leur propre sensibilité.

Désormais, le fado entame sa seconde vie, porté haut et fort par l'émergence de multiples nouveaux talents qui redonnent des couleurs et des tonalités différentes à cet art.

Le fado entame dorénavant une existence éternelle, puisque désormais il a enfin de multiples visages.

 

"Silence... car on va chanter le fado !"

 

 Mario Pontifice - Portugalmania - Décembre 2007

 

 

 

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