Portugal : Finie, la crise
!
Après
des années d'austérité
et de durs effets
s'étant fait sentir
du fait de la crise
économique que le
Portugal a traversé,
le premier ministre
portugais José
Socrates
a officiellement
considéré que la
crise au Portugal
était finie !
Succès...
Se
basant sur le fait
que le déficit public
du Portugal en 2007
est parvenu à atteindre
un niveau inférieur
(2,6%) au déficit
initialement prévu
pour 2007 (3%),
José Socrates considère
qu'il s'agit là
d'une preuve évidente
que le Portugal
est désormais sorti
de la longue crise
qu'il a traversé.
Pour
la première fois
depuis 2003, le
déficit public portugais
se retrouve en effet
sous le seuil maximal
de 3% imposé par
Bruxelles. Il s'agit
même du niveau
de déficit le plus
bas jamais atteint
depuis 1974 par
le Portugal.
Après
le court passage
aux affaires de
Santana Lopes et
surtout le départ
précipité de Josè
Manuel Durao Barroso
pour Bruxelles en
plein millieu de
son mandat, José
Socrates est arrivé
aux affaires au
Portugal en 2005
à l'issue d'élections
législatives remportées
par son parti (PS).
Il a alors
trouvé un pays dans
un gouffre financier,
croulant sous les
dettes et asphyxié
de toutes parts,
la plupart des indicateurs
économiques dans
le rouge, et un
déficit public au niveau
catastrophique de
6,1% du PIB.
José
Socrates a alors entrepris
de multiples réformes,
dont certaines considérées
comme de véritables
révolutions, induisant
un mécontentement
d'une rare intensité
de la part de la
quasi totalité des
couches de la population.
Mesures
radicales...
Désireux
de mener en parallèle
une véritable guerre
contre la rigidité
bureaucratique et
la corruption au
Portugal, il a entrepris
plus de 300 mesures visant à simplifier les procédures
entre l'administration
et les citoyens,
et favorisant à
ces derniers l'accès
à toute information.
Désormais l'administration
portugaise doit
faire preuve de
rapidité et de transparence,
et se doit de rendre
des comptes.
D'entrée
de jeu, Socrates
a
déclaré vouloir balayer la bureaucratie, améliorer la qualité de vie des citoyens,
leur faire
gagner du temps en simplifiant les procédures administratives, rendre l'Etat plus proche, plus accessible, moins arrogant et moins
opaque, et éliminer les lourdeurs inutiles qui contribuent à freiner la croissance de
l'économie portugaise.
Plan
de redressement...
Depuis 2005, José Socrates a entrepris un plan de redressement du pays tournant autour
de plusieurs axes :
- La récupération de la confiance des investisseurs
et des industriels par différents biais, et rendre le Portugal plus
attractif pour les
investisseurs étrangers.
-
La réforme complète
de la santé. Sur
ce plan, un vaste
programme relatif
à la gestion et
à la modernisation
des structures de
santé est en cours,
non sans mal et
non sans heurts,
mais il poursuit
son chemin. Une
totale mise
à plat du système
de santé et un assainissement
ont complété le
tableau, car le
secteur de la santé
portugais était
le théâtre de beaucoup
d'abus, émanant
souvent notamment
de professionnels
de la santé qui
s'auto-attribuaient
parfois des privilèges
abusifs.
Socrates
vient d'annoncer
pour la première
fois un solde positif
de la sécurité sociale
portugaise sur 2007
de 1, 218 Milliards
d'Euros.
-
Faciliter la création
d'entreprises. Dans
le cadre d'un vaste
programme appelé
Simplex, il est
possible depuis
2007 de créer une
entreprise au Portugal
en 1 heure chrono
(y compris par internet
pour de petites
structures).
NB.
Il est également
possible de réserver
directement une
marque par internet.
- La mise en place d'un vaste plan technologique misant sur l'innovation,
les nouvelles technologies, la formation et la recherche-développement. - La modernisation de l’administration publique,
avec une réduction substantielle du nombre de fonctionnaires et une harmonie
des statuts des
fonctionnaires avec
ceux du privé. Ces mesures semblent d'ailleurs largement inspirer des dirigeants d'autres
pays européens ;-)
Socrates
a souhaité faire d'une
pierre deux coups.
Réduire la bureaucratie
tout en taillant de
façon drastique
dans les dépenses
de l'Etat, allant
jusqu'à supprimer
plus de 180 organismes
administratifs jugés
non justifiés ou
inefficaces. Pire
qu'une révolution,
un véritable cataclysme,
ayant comme on l'imagine
entraîné des vagues
colossales de mécontentements.
- La fin des entraves et obstacles
bureaucratiques freinant l'efficacité, les initiatives
et les investissements et rendant parfois la vie des citoyens impossible.
De nombreux chamboulements
ont donc eu lieu...
Des inscriptions scolaires à la santé, en
passant par les procédures administratives lors de l'achat d'un bien
immobilier... Des documents d'identité aux formalités pour les
sociétés... L'ensemble des démarches concernant la vie quotidienne des
citoyens et des entreprises ont été concernés, avec une large mise à contribution
des nouvelles technologies.
Le
Portugal a même
été déclaré récemment
avec la Grande Bretagne,
comme le pays européen
le plus moderne
et le plus en avance
sur le plan de la
facilité d'accès,
de traitement, et
de la mise
à disposition de
l'information et
des processus administratifs
par internet.
- La consolidation
des finances publiques avec un contrôle des dépenses rigoureux.
Dans cette
course aux réformes profondes, José Socrates s'est inévitablement
heurté à des résistances corporatistes,
ainsi qu'à de multiples heurts sociaux qui ont fusé de toute
part. D'après Socrates, le Portugal se devait cependant de passer par
des réformes de cette ampleur et des mesures draconiennes pour se sortir du gouffre
et de l'inertie
dans laquelle il se trouvait depuis de nombreuses années.
Et
plus encore...
Dans cette vague déferlante qui s'est
abattue sur le Portugal
depuis deux ans
du fait des mesures
entreprises par
Socrates, d'autres
aspects n'ont pas
été oubliés, tels
la lutte contre
les inégalités, une recherche constante de l'amélioration des conditions
de vie des personnes âgées, ou
encore la réduction des inégalités existant entre
les diverses régions portugaises, ainsi que le désenclavement de
certaines d'entre
elles. La condition
féminine à travers
des aspects sociologiques
a également été
abordée par la réalisation
d'un référendum sur la fin
de la dépénalisation de l'avortement.
La
mise en place d'un
plan global tendant
entre autres à équiper
les collectivités,
les écoles, les
élèves et les enseignants
de matériel informatique
dédié et connecté
à Internet, a également
fait l'objet d'attentions
particulières, banalisant
ainsi l'accès
et l'ouverture aux
nouvelles technologies
par le plus grand
nombre.
L'accent sur la protection des consommateurs a
également été prise
en considération
de façon nette. De nouvelles lois ont ainsi
été votées afin de tenter de réduire
les abus bancaires.
L'accès à la propriété, notamment aux jeunes et aux
moins bien nantis, a également été favorisé par le biais de mesures
appropriées.
Cette
longue liste incomplète
n'en souffre pas
pour autant de lacunes
facilement perceptibles
par les citoyens
au quotidien, qui
affichent volontiers
et à juste titre
mécontentement et
insatisfaction car bien
des choses restent
à faire. Mais le
Portugal avance
manifestement à
grands pas.
Le
Portugal tiré d'affaire
?
Le
très vaste chantier
auquel le premier
ministre portugais s'est
attaqué semble avoir
commencé à produire
ses fruits; personne
ne conteste les
résultats. Et José
Socrates estime
que l'atteinte des
objectifs a créé
les conditions plus
favorables pour la
croissance et
l'emploi, ainsi
que pour l'attractivité
de l'investissement
extérieur.
Le
Portugal serait-il
enfin "tiré
d'affaire"
? Dans ce contexte
international incertain
que l'on espère
passager, et une
crise de la sphère
financière en mouvance,
beaucoup d'analystes
au Portugal jugent
prématuré le "positivisme"
de Socrates; certains
allant jusqu'à considérer
qu'en adoucissant
les
contours de sa politique
et en positivant
à outrance par anticipation,
Socrates est entré
dans une stratégie
politicienne en
commençant d'ores
et déjà à
préparer les prochaines
élections législatives
qui n'auront pourtant
lieu qu'en 2009.
L'image
de Socrates...
Les
partisans de cette
dernière théorie
y croient d'autant
plus que José Socrates est
obligé de redorer
son blason, vu qu'il
souffre d'une très
mauvaise image au
Portugal. Il est
souvent jugé comme
arrogant et autoritaire, ne
souffrant pas la
moindre contestation,
et créant même un
climat détestable,
bizarre ou suspicieux.
Quand Socrates parle,
il crie. Lorsqu'il
fait un discours, il
semble constamment s'égosiller
sans raison apparente,
donnant sans cesse
l'impression d'avoir
avalé plusieurs
noyaux d'olive de
travers. Cela peut
porter à rire, mais
s'avère à la longue
réellement irritant
pour son auditoire.
Le pire est que
selon beaucoup de
portugais, depuis
l'arrivée de Socrates
au pouvoir, il se
serait instauré
- toutes proportions
gardées - une sorte
de climat de
peur qui rappellerait parfois
sous certains aspects la
dictature de laquelle
le Portugal est
pourtant sensé s'être
libéré depuis
1974. Ainsi, on
reproche entre autres
à Socrates d'avoir
"on œil affûté
et pesant"
sur les critiques
à son égard ainsi
que sur les
médias, ce qui en
démocratie s'avère intolérable.
Par
ailleurs, son récent
refus de soumettre
la ratification
du traité de Lisbonne
au référendum populaire
comme il l'avait
pourtant promis
pendant sa campagne
électorale, n'a
fait que ternir
son image et amplifier
le mécontentement
de la majorité de
portugais hostiles
à l'adoption du
dit traité par voie
parlementaire, considérant
Socrates comme un
menteur ne tenant
pas ses promesses,
privant les citoyens
de parole, et voulant à
tout prix entraîner
le Portugal malgré
eux, dans
une Europe technocrate,
précarisante et
obscure.
Si
la popularité de José
Socrates s'est autant
ternie, cela tient de
toute évidence à
l'image de rigidité
qu'il affiche sans
retenue et qu'il
a omis d'adoucir
en lui donnant des
contours un minimum "diplomatiques".
Un bon conseiller
en communication
devrait facilement
parvenir à lui
faire corriger ce
défaut pourtant
basique, mais réellement dévastateur
en terme d'image.
Mais
à sa décharge, cela
tient - paradoxalement
- aussi et probablement
surtout, à une certaine forme
de clairvoyance
ou de courage de
sa part, par le
fait qu'il soit
le premier politique
portugais ayant
réellement souhaité
moderniser le pays
coûte que coûte,
et osé donner une telle ampleur
aux mesures
aussi impopulaires
que sans précédent qu'il
a entreprises dans
un pays souffrant
d'immenses lacunes,
de gigantesques
déficiences, et
d'un manque de crédibilité
en général. On
ressort rarement indemne
d'une aussi grande
bataille.
Socrates
un salaud, un fou
furieux, un lucide audacieux,
ou un véritable
révolutionnaire
positif ayant apporté au Portugal
l'assise et la crédibilité dont
il avait besoin
? L'avenir et l'Histoire
trancheront inévitablement.
Baisse
de la tva au Portugal
!
José
Socrates semble
cependant si sûr
des effets positifs
des mesures entreprises,
qu'il vient même
à la stupéfaction
quasi-générale, d'annoncer
une baisse de la
tva portugaise qui
passera le 1er juillet
2008 de 21 à 20%,
et ce malgré les
vives critiques
rencontrées lors
de cette décision.
Courage,
véritable foi en
son travail, inconscience,
coup de bluff médiatique
pour faire retrouver
la confiance aux
portugais ?
L'avenir dira si
José Socrates vient
de pêcher par excès
d'optimisme, ou
si la multitude
des mesures qu'il
a entreprises s'avèrent
effectivement payantes
et vont enfin
faire sortir le
Portugal du marasme
dans lequel il se
trouvait.
Constat...
Le
Portugal avait un
net besoin de stabilité,
de consolidation
de ses comptes,
et de confiance.
Dans la réalité
rien n'est acquis
car :
- Les
entreprises portugaises souffrent
encore d'un manque
de modernisation
de leur appareil
de production et le
niveau de productivité
portugais est loin
d'être optimum.
-
Elles manquent
de trésorerie et
s'écroulent à une
vitesse record,
(50 mille fermetures
de PME en 2007,
soit le double de
l'année 2006)
-
Les familles portugaises
sont endettées à
hauteur de 128 Milliards
d'Euros, soit 80%
du PIB portugais
(source Banque du
Portugal).
- Le
salaire minimum
est un des plus
bas d'Europe et
la pauvreté ainsi
que la précarisation
induites par les
conséquences du souffle
capitaliste ultra
libéral qui balaye
l'Europe asseyant
ses bases sur
la finance et sur
le virtuel ,
atteint aussi le
Portugal de plein
fouet.
-
La confiance des
entrepreneurs et
des ménages portugais
est au plus bas.
-
Et la consolidation
des comptes publics
est encore fragile,
surtout dans un
contexte international
tourmenté et un
prix du pétrole
atteignant des sommets.
Y
croire ?
Il
n'empêche que le
Portugal a réellement été
assaini en de nombreux
points par des mesures
et des réformes
aussi concrètes
qu'Herculéennes;
que de grands travaux
sont en prévision
à court terme; et
que le pays s'est
dessiné un futur
plus solide et plus
propice à des lendemains
qui chantent.
Comme
dirait une jeune
femme amoureuse
en regardant son
partenaire au
niveau de la ceinture
: "Pourvu
que ça dure"
!
Et
espérons que les
lendemains supposés
chanter pour le
Portugal, engendreront
une chanson harmonieuse
et attrayante pour une
population qui jusqu'ici
a joui de la curieuse
réputation d'avoir les
portugaises ensablées
malgré elle.
Mario Pontifice - Portugalmania - 1 avril 2008 |