Rien ! Il
suffit de lire, de suivre et d'écouter...
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Ana
Moura
Une
fadiste ayant plus qu'une âme, plus qu'un
coeur, plus qu'une aura...
A l'instar de Jules César
en d'autres temps, Ana Moura est venue (au
fado), elle a vu, (et a été remarquée), et
surtout... elle a vaincu !
Elle a vaincu
brillamment le bataille des débuts d'une
artiste, un chemin inévitablement semé d'embûches
ou de doutes.
Elle a vaincu
la barrière pouvant exister entre un public
méfiant envers une jeune artiste, surtout
une fadiste, cible fragile que l'on
attend avec des préjugés demeurant inévitablement
encore à l'ombre du chêne massif d'Amalia.
Elle a vaincu
l'insignifiant, le standard, le convenu,
le fade... pour en faire du fado, tout simplement.
Simplement ? Sans doute pas, car Ana a quelque
chose d'autre, non pas ce petit rien, mais
cet énorme rien qui fait un tout et qui
démarque. Ana dit ses mots simplement, des
mots simples mais qu'elle vit et qu'elle
ressent. Du vécu ? En tout cas... du talent.
1 - Voici en premier lieu
la traduction des paroles d'un fado chanté par Ana
Moura. Il est important de lire cette traduction au préalable afin de connaître
le contexte de la chanson et de s'imprégner de son atmosphère.
(Paroles et musique de Tozé Brito)
Entre tes yeux bleus
Et un tableau bleu de Picasso,
Entre le son de ta voix
Et le son d'une quelconque
constellation,
Entre ta bague en argent
Et tout l'or du monde,
Je choisirais ce qui
est à toi
Je n'hésiterais pas
une seconde.
Combien de vagues
y a-t-il dans la mer
Combien d'étoiles y
a-t-il dans le ciel
Autant, que de fois
dans mes rêves
Je fus à toi et tu
fus à moi.
Entre ta bague en argent
Et tout l'or du monde,
Je choisirais ce qui
est à toi
Je n'hésiterais pas
une seconde.
Entre le ciel de ta
bouche
Et la lumière du ciel
de Lisbonne,
Entre un mot de toi
Et un poème de (Fernando)
Pessoa,
Entre la couleur de
ton sourire
Et tout l'éclat du monde,
Je choisirais ce qui
est à toi
Je n'hésiterais pas
une seconde.
Entre ta bague en argent
Et tout l'or du monde,
Je choisirais ce qui
est à toi
Je n'hésiterais pas
une seconde.
2 - Voici maintenant le fado
lui-même, que l'on peut écouter tout en suivant les
paroles se trouvant au-dessous. A ce stade, cette gymnastique
est appréciable et appréciée par le cerveau.
N'essayons surtout pas de nous souvenir
de la signification d'un mot quelconque ou de buter
où que ce soit. Grâce à la traduction vue plus haut, nous connaissons globalement
le contenu du fado de Ana Moura. Il suffit de bien écouter
les mots prononcés tout en les suivant du regard, et
se laisser entraîner par les sonorités portugaises...
Rien de plus...
Não hesitava um segundo (Je n'hésiterais pas une seconde) Interprétation : Ana Moura
Entre os teus olhos azuis
E um quadro azul de Picasso,
Entre o som da tua voz
E o som de qualquer compasso,
Entre o teu anel de prata
E todo o ouro do mundo,
Escolheria o que é teu
Não hesitava um segundo.
Quantas ondas há no mar
Quantas estrelas no céu,
Tantas quantas nos meus sonhos
Eu fui tua e foste meu,
Entre o teu anel de prata
E todo o ouro do mundo,
Escolheria o que é teu
Não hesitava um segundo.
Entre o céu da tua boca
E a luz do céu de Lisboa,
Entre uma palavra tua
E um poema de Pessoa,
Entre a cor do teu sorriso
E todo o brilho do mundo,
Escolheria o que é teu
Não hesitava um segundo.
Entre o teu anel de prata
E todo o ouro do mundo,
Escolheria o que é teu
Não hesitava um segundo.
Langueur, tendresse...
Voilà. C'est
un peu vide, la fin d'un fado, n'est-ce pas ? Il fait
place au silence, et reste encore empreint d'une certaine
douceur, elle même contenant une sorte d'amertume, celle
d'un fin, mais qui pour tout portugais n'est qu'une
étape ou une pause, vu que pour les portugais, la vraie fin n'existe
pas.
C'est probablement
là un point fort, et presque un hymne à l'optimisme ! :-)
Si l'écoute
de ce fado n'a pas été un supplice, c'est que la
langueur fadiste nous a un peu gagnée, et que nous
avons assisté à une attendrissante déclaration
d'amour, presque impudique car trop personnelle, mais
collant parfaitement à la teneur des fados, qui ne sont pas
forcément des complaintes, mais aussi et surtout une
forme d'exprimer ses sentiments profonds, de les dire,
de les confier, de les sortir de soi, de les penser
à voix haute... et de partager ainsi un moment complice.
Un fado n'est
pas triste; il est langoureux. Un fado n'est pas un
pleur; il peut faire pleurer suivant le contexte. Il n'est pas un cri suppliant
mais peut cependant aller jusqu'à manquer
de dignité, de par les confessions intimes et extrêmement
fortes qui font de nous des confidents compatissants
mais impuissants. Et c'est ce contexte auquel nous nous
trouvons confrontés malgré nous, devenant une sorte
de confidents impuissants, qui créé souvent l'intensité
dramatique d'un fado.
***
Cette fiche n'a à priori
requis aucun effort de mémorisation. Elle a simplement
eut une double fonction, mais de taille...
- Celle de "teinter" le
cerveau de sonorités de mots portugais prononcés dans
un contexte posé et bien spécifique, car inévitablement
induites d'une sensibilité due aux paroles, à l'artiste
et au fado lui-même. Malgré nous, nous avons "enregistré"
un certain nombre "d'informations" utiles,
et bien plus que nous ne l'imaginons. :-)
- Celle de peut-être nous faire
connaître Ana
Moura, une artiste fadiste de talent,
à propos de laquelle il n'est désormais plus question
d'avenir mais de présent. Et également de percevoir
les sonorités langoureuses et limpides de
la guitare portugaise accompagnant Ana.
... Peut-être une troisième fonction
? Si vous avez souhaité écouter ce fado jusqu'au bout
et dans de bonnes conditions, il s'agit peut-être de
votre premier fado écouté en entier.
Si c'est le cas, cette petite cession
aura donc peut-être aussi eu le mérite de vous faire
fondre malgré vous dans un contexte particulier, en vous
imprégnant un minimum dans un moment de sensibilité et
de tendresse très spécifique, la sensibilité qui colle à l'âme du
Portugal, qui ne s'invente pas, et ne peut se comprendre
ou se ressentir à la longue, qu'en prenant peu à peu
le temps et la peine de se laisser envahir ...
Sans prétention déplacée,
il se pourrait même que vous veniez tout simplement d'épouser
le sens de l'écoute d'un fado et ainsi mine de rien,
"d'apprendre" à écouter un fado... Qui sait
? Et si c'est le cas, tant mieux pour les fadistes.
:-)
Tenter de réellement connaître
une langue ou un pays, n'est-ce pas déjà et surtout
commencer par essayer de s'imprégner d'une petite dose
de l'âme de ses habitants ? :-)
NB. Au cas où cela vous dise d'explorer
le fado de long en large, vous pouvez cliquer ici, afin de vous rendre sur la section
de Portugalmania, complète et entièrement consacrée au fado. Une
nouvelle page s'ouvrira, et cette section de mots portugais
restera donc
active sur votre écran.
A bientôt,
sur la prochaine fiche...
***
Notes :
*La traduction du mot "compasso"
a été choisie de façon arbitraire.
En effet ce terme peut avoir de
multiples significations, telle
une division spécifique d'une partition
musicale, un compas, ou encore différentes
significations imagées, parmi lesquelles une
constellation. Ne connaissant pas
la pensée de l'auteur, c'est ce
dernier terme qui a été choisi dans
la traduction.