FICHE  N. 54


 

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Rien ! Il suffit de lire, de suivre et d'écouter...

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Ana Moura


FADO portugaisUne fadiste ayant plus qu'une âme, plus qu'un coeur, plus qu'une aura...

A l'instar de Jules César en d'autres temps, Ana Moura est venue (au fado), elle a vu, (et a été remarquée), et surtout... elle a vaincu !

Elle a vaincu brillamment le bataille des débuts d'une artiste, un chemin inévitablement semé d'embûches ou de doutes.

Elle a vaincu la barrière pouvant exister entre un public méfiant envers une jeune artiste, surtout une fadiste, cible fragile que l'on attend avec des préjugés demeurant inévitablement encore à l'ombre du chêne massif d'Amalia.

Elle a vaincu l'insignifiant, le standard, le convenu, le fade... pour en faire du fado, tout simplement. Simplement ? Sans doute pas, car Ana a quelque chose d'autre, non pas ce petit rien, mais cet énorme rien qui fait un tout et qui démarque. Ana dit ses mots simplement, des mots simples mais qu'elle vit et qu'elle ressent. Du vécu ? En tout cas... du talent.

1 - Voici en premier lieu la traduction des paroles d'un fado chanté par Ana Moura. Il est important de lire cette traduction au préalable afin de connaître le contexte de la chanson et de s'imprégner de son atmosphère.

 

(Paroles et musique de Tozé Brito)

Entre tes yeux bleus
Et un tableau bleu de Picasso,
Entre le son de ta voix
Et le son d'une quelconque constellation,
Entre ta bague en argent
Et tout l'or du monde,
Je choisirais ce qui est à toi
Je n'hésiterais pas une seconde.
 
Combien de vagues y a-t-il dans la mer
Combien d'étoiles y a-t-il dans le ciel
Autant, que de fois dans mes rêves
Je fus à toi et tu fus à moi.
Entre ta bague en argent
Et tout l'or du monde,
Je choisirais ce qui est à toi
Je n'hésiterais pas une seconde.
 
Entre le ciel de ta bouche
Et la lumière du ciel de Lisbonne,
Entre un mot de toi
Et un poème de (Fernando) Pessoa,
Entre la couleur de ton sourire
Et tout l'éclat du monde,
Je choisirais ce qui est à toi
Je n'hésiterais pas une seconde.
 
Entre ta bague en argent
Et tout l'or du monde,
Je choisirais ce qui est à toi
Je n'hésiterais pas une seconde.

 

2 - Voici maintenant le fado lui-même, que l'on peut écouter tout en suivant les paroles se trouvant au-dessous. A ce stade, cette gymnastique est appréciable et appréciée par le cerveau.

N'essayons surtout pas de nous souvenir de la signification d'un mot quelconque ou de buter où que ce soit. Grâce à la traduction vue plus haut, nous connaissons globalement le contenu du fado de Ana Moura. Il suffit de bien écouter les mots prononcés tout en les suivant du regard, et se laisser entraîner par les sonorités portugaises... Rien de plus...

 

Não hesitava um segundo
(Je n'hésiterais pas une seconde)
Interprétation : Ana Moura

 

Entre os teus olhos azuis
E um quadro azul de Picasso,
Entre o som da tua voz
E o som de qualquer compasso,
Entre o teu anel de prata
E todo o ouro do mundo,
Escolheria o que é teu
Não hesitava um segundo.

Quantas ondas há no mar
Quantas estrelas no céu,
Tantas quantas nos meus sonhos
Eu fui tua e foste meu,
Entre o teu anel de prata
E todo o ouro do mundo,
Escolheria o que é teu
Não hesitava um segundo.

Entre o céu da tua boca
E a luz do céu de Lisboa,
Entre uma palavra tua
E um poema de Pessoa,
Entre a cor do teu sorriso
E todo o brilho do mundo,
Escolheria o que é teu
Não hesitava um segundo.

Entre o teu anel de prata
E todo o ouro do mundo,
Escolheria o que é teu
Não hesitava um segundo.

 

Langueur, tendresse...

Voilà. C'est un peu vide, la fin d'un fado, n'est-ce pas ? Il fait place au silence, et reste encore empreint d'une certaine douceur, elle même contenant une sorte d'amertume, celle d'un fin, mais qui pour tout portugais n'est qu'une étape ou une pause, vu que pour les portugais, la vraie fin n'existe pas.

C'est probablement là un point fort, et presque un hymne à l'optimisme ! :-)

Si l'écoute de ce fado n'a pas été un supplice, c'est que la langueur fadiste nous a un peu gagnée, et que nous avons assisté à une attendrissante déclaration d'amour, presque impudique car trop personnelle, mais collant parfaitement à la teneur des fados, qui ne sont pas forcément des complaintes, mais aussi et surtout une forme d'exprimer ses sentiments profonds, de les dire, de les confier, de les sortir de soi, de les penser à voix haute... et de partager ainsi un moment complice.

Un fado n'est pas triste; il est langoureux. Un fado n'est pas un pleur; il peut faire pleurer suivant le contexte. Il n'est pas un cri suppliant mais peut cependant aller jusqu'à manquer de dignité, de par les confessions intimes et extrêmement fortes qui font de nous des confidents compatissants mais impuissants. Et c'est ce contexte auquel nous nous trouvons confrontés malgré nous, devenant une sorte de confidents impuissants, qui créé souvent l'intensité dramatique d'un fado.

 

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Cette fiche n'a à priori requis aucun effort de mémorisation. Elle a simplement eut une double fonction, mais de taille...

- Celle de "teinter" le cerveau de sonorités de mots portugais prononcés dans un contexte posé et bien spécifique, car inévitablement induites d'une sensibilité due aux paroles, à l'artiste et au fado lui-même. Malgré nous, nous avons "enregistré" un certain nombre "d'informations" utiles, et bien plus que nous ne l'imaginons. :-)

- Celle de peut-être nous faire connaître Ana Moura, une artiste fadiste de talent, à propos de laquelle il n'est désormais plus question d'avenir mais de présent. Et également de percevoir les sonorités langoureuses et limpides de la guitare portugaise accompagnant Ana.

 

... Peut-être une troisième fonction ? Si vous avez souhaité écouter ce fado jusqu'au bout et dans de bonnes conditions, il s'agit peut-être de votre premier fado écouté en entier.

Si c'est le cas, cette petite cession aura donc peut-être aussi eu le mérite de vous faire fondre malgré vous dans un contexte particulier, en vous imprégnant un minimum dans un moment de sensibilité et de tendresse très spécifique, la sensibilité qui colle à l'âme du Portugal, qui ne s'invente pas, et ne peut se comprendre ou se ressentir à la longue, qu'en prenant peu à peu le temps et la peine de se laisser envahir ...

Sans prétention déplacée, il se pourrait même que vous veniez tout simplement d'épouser le sens de l'écoute d'un fado et ainsi mine de rien, "d'apprendre" à écouter un fado... Qui sait ? Et si c'est le cas, tant mieux pour les fadistes. :-)

Tenter de réellement connaître une langue ou un pays, n'est-ce pas déjà et surtout commencer par essayer de s'imprégner d'une petite dose de l'âme de ses habitants ? :-)

 

NB. Au cas où cela vous dise d'explorer  le fado de long en large, vous pouvez cliquer ici, afin de vous rendre sur la section de Portugalmania, complète et entièrement consacrée au fado. Une nouvelle page s'ouvrira, et cette section de mots portugais restera donc active sur votre écran.

 

A bientôt, sur la prochaine fiche...

 

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Notes :
 
*La traduction du mot "compasso" a été choisie de façon arbitraire. En effet ce terme peut avoir de multiples significations, telle une division spécifique d'une partition musicale, un compas, ou encore différentes significations imagées, parmi lesquelles une constellation. Ne connaissant pas la pensée de l'auteur, c'est ce dernier terme qui a été choisi dans la traduction.

 

 

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